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Onze kilos cinq
3 février 2014

Murud, suite et fin

En quittant Sugam et ses parents hier, je suis allee manger dans un petit restau a cote de mon hotel. Riz blanc et lentilles, un plat basique en Inde que j'aime beaucoup. Le proprietaire du lieu, un vieux monsieur aux cheveux blancs, vient me parler pendant que j'attend ma commande. Je dois l'intriguer et il me pose lui aussi les questions habituelles: d'ou je viens, etc etc...? Depuis que je suis en Inde, je reponds toujours aux questions qu'on me pose avec un grand sourire; meme si on me pose 4 fois la meme question, meme si parfois ce sont des questions completement incongrues, voire indiscretes. Dans ces cas-la je me permet d'inventer... Je lui reponds donc avec le meme sourire qu'avec tous les gens que j'ai rencontres jusqu'ici. Un sourire ne coute pas grand-chose et peut rapporter beaucoup! Soudain on lui passe un telephone, il discute en hindi deux minutes et me passe l'appareil: c'est son fils au bout du fil, il est a Dallas, Texas, il veut que je lui parle. L'incongruite n'a pas de limite dans ce pays! Je parle un instant avec ce garcon qui me souhaite tout le meilleur pour mon voyage en Inde, puis je lui repasse son pere. Dans la foulee je fais connaissance avec les enfants de la tablee voisine. Le petit garcon, 10 ans, est trognon. Il parle un peu anglais et me demande: "Where do you come from forest?" voulant savoir si je viens de l'etranger, et d'ou. How cute! Il me demande si je parle Marati, la langue regionale du Maharastra, et je sors mon carnet avec les quelques mots que j'ai appris dans la journee. Ca les fait marrer lui et sa soeur, je dois avoir un accent a couper au couteau! Les parents sont tres gentils aussi, et en partant ils m'offrent un jus de fruit! Sur ces entrefetes, l'un des gars qui bossent la m'amene ses potes: c'est la fille qui a dessine le temple Jain cet aprem! Il m'a reconnue (facile) alors qu'evidement je ne me souviens pas de sa tete. On regarde mon carnet, on me congratule, et une jeune femme s'attele a m'expliquer comment manger mon dal (riz+lentilles); elle me fait meme le melange dans mon assiette! Je suis le centre de toutes les attentions, c'est drole. Un homme me prend en photo quand je mange, j'espere que je n'ai pas du dal plein les dents. On m'a dit que je pouvais prendre mon bus pour Roha au carrefour a cote du restau; je demande confirmation aux gars du restau qui me disent que oui, il y a des bus toutes les heures pour Roha, pas de probleme. Mon train part a 14h45, le bus met deux heures, je prevois s\donc de partir a 10h30 histoire d'etre large (precaution indispensable ici). 

Donc ce matin, je me leve tranquillement, refais mon sac, vais prendre un petit dejeuner au restau d'hier en attendant mon bus.

[interlude socio-anthropologique: Je suis assise derriere le comptoir/presentoir, cachee derriere des bocaux en plastique remplis de bonbons et des piles de paquets de pain de mie. Le comptoir/caisse est face a moi, l'entree a ma droite. A ma gauche la cuisine et a cote de la porte le frigo avec les bouteilles d'eau et boissons gazeuses. La surface de la piece doit etre de 35 ou 40 metres carres. Un couple de blancs entre (j'hesite entre anglais et australiens) pour acheter un pepsi; je n'ai quasiment pas vu de blancs depuis que je suis a Murud. Ils mettent beaucoup de zele a ne pas me voir, et m'ignorent avec brio. Ca me fait rire. Il n'y a que 4 personnes dans la piece, il faut le faire! La patronne qui les encaisse me lance des coups d'oeil en souriant: est-ce qu'elle aussi percoit le comique de la petite comedie qui se joue? Une fois de plus je pense a Jean-Didier Urbain (que je me suis coltine pour mon memoire): le touriste n'aime pas voir son reflet. On dirait que ceux-la ne font pas exception.]

Je disais donc: 10h00, je quitte l'hotel pour prendre mon petit dej en face, puis choper le bus de 10h30 pour Roha ou j'ai un traina 14h45 pour Goa. Je redemande confirmation au type du restau et lui demande comment je fais pour reconnaitre mon bus. C'est marque dessus me dit-il. En anglais ou en hindi? En hindi. Ok, je suis pas sortie de l'auberge. En plus un client lui dit que non c'est pas 10h30 mais 10h00, je l'ai loupe. Ah. Mais y'en a d'autres non? Oui oui, 11h, 12h... Je prendrais celui de 11h00 alors. 10h45, je vais me poster a cote du temple au milieu du carrefour qui sert aussi d'arret de bus et de station de rickshaw. Je n'ai aucune idee de comment je vais choper ce bus, ils sont tous rouges et les destinations sont ecrites en hindi. Je vais voir le marchand de bonbecs a cote, lui redemande si c'est bien la les bus pour Roha, a quelle heure, comment le reconnaitre. C'est bien la me dit'il, il passe a 11h00, on m'indiquera. Je pose mes affaires a l'ombre du temple et demande a la petite vieille assise la si elle se rend a Roha. Non, mais je suis au bon endroit. Ok. Elle s'en va peu apres. Un homme vient attendre avec ses deux fils, je lui demande ou il va: pas a Roha non plus. Il ajoute qu'il n'y a pas de bus a 11h00 pour Roha, mais seulement un a 12h30. Me voila bien! Je retourne vers le marchand de bonbons: vous etes sur pour le bus? 11h00? Oui oui, il va arriver. Non mais parce que le papa la, m'a dit qu'il n'y avait pas de bus a 11h00... Si si, 11h30, sur. Mais bien sur, les horaires fluctuent selon le sens du vent, c'est ca? La j'apercois un couple de blancs qui montent dans un rickshaw avec leurs sacs a dos. Je vais leur demander si par hasard ils n'iraient pas a Roha. Non, Kashid. Ils ne sont pas sympathiques, j'ai l'impression de les faire chier. Decidement, Jean-Didier a raison. Ou peut-etre qu'ils sont mal reveilles. Je retourne a mon poste, et demande a chaque bus qui s'arrete s'il va a Roha: chou blanc. Le pere et ses fils s'en vont. Un autre type est la, pas tres causant mais il comprend que j'ai besoin d'aller a Roha. Il decrypte les noms des bus mais pas le moindre ne va a Roha. Mon ephemere accolyte s'en va avec d'autres comperes: me voila seule dans ma merde, me dis-je. Il est temps que ce bus arrive: je n'ai plus d'ongles a ronger. Je fais une liste metale de mes options: je peux attendre jusqu'a 11h30 et voir si ce fameux bus arrive. A ce moment, si je ne suis toujours pas en route, je prendrai un rickshaw jusqu'a la gare routiere et je verrai s'il y a d'autres bus qui peuvent m'emmener. Au pire, celui de 12h30 dont on m'a parle fera l'affaire. Ce sera un peu juste mais j'ai confiance. Et s'il n'y a pas de bus, j'ai toujours l'option de prendre un taxi. Ca me coutera beaucoup plus cher que le bus qui coute 50 roupies, mais bon, converti en euros ca ne fait pas grand-chose. Et au pire du pire, je perds mon billet de train a 500 roupies (4 euros environ) et j'improvise. Rien de stresser me dis-je, je vais attendre 11h30 et j'aviserai. J'ai confiance. Je ne sais pas en quoi, mais j'ai confiance. Soudain, les deux gamins rencontres au restau de la veille surgissent: salut les bouts de chou! Je les trouve truo mignons, ca me fait plaisir de les revoir. Leur mere vient me saluer, et me demande ou je vais: a Roha prendre un train. "On t'emmene! C'est sur notre route!" Vraiment!?! Je n'en reviens pas, c'est trop beau pour etre vrai. Le pere me fait signe de venir: c'est donc reel, ils m'emmenent a Roha. On fourre mes affaires dans la voiture: "We will adjust, no problem!" Le caractere presque miraculeux de la situation me ferait presque pleurer. Quelle chance! Je les remercie chaleureusement et je monte dans la voiture.Les deux femmes s'assoient a l'arriere (la mere et la belle-mere), les enfants et moi derriere le conducteur, et les deux hommes sont a l'avant (le pere et...?). Le gamin me demande ce que je trimballe avec moi: "c'est un ukulele, pour faire de la musique. Je te montre?" Je leur joue un morceau, le petit veut essayer. Je lui montre comment tenir l'instrument, comment gratter les cordes et faire un do. Il adore. Il passe a sa soeur pour qu'elle essaye. La route pour Roha est grandiose: montagnes couvertes de forets, mais on sent qu'il fait sec depuis longtemps. Au detour d'un virage, un chemin s'enfonce dans la foret: j'apercois un grand drapeau communiste au croisement. Qu'est-ce qu'il fout la?

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