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Onze kilos cinq
4 avril 2014

Hampi : suite et fin et début de la suite

Voilà maintenant plus d'un mois que je suis arrivée à Pondichéry ; il est temps que je raconte cette partie de mon voyage!

Les derniers jours à Hampi, fin février, se sont déroulés tranquillement, entre balades dans les rochers, sessions d'escalade, croquis dans les montagnes et après-midi nonchalants. Les uns et les autres se préparaient au départ, Gal et Chris pour Goa, Igor et sa copine pour le nord, moi pour Pondichéry. Tom m'expliquait qu'il allait bientôt partir vers le nord pour grimper, car il ferait bientôt trop chaud pour escalader dans la région. Il était temps de se remettre en route, malgré les charmes envoûtants d'Hampi qui poussent certains à y rester plusieurs semaines - voire plusieurs mois.

J'ai réservé un bus pour Bangalore afin de faire une étape sur la route pour Pondichéry. Je ne tenais pas à faire 16h de bus d'un coup, et j'avais besoin d'y aller progressivement avant de retourner à la civilisation. Je suis partie d'Hampi en fin d'après-midi pour traverser avant la nuit, et prendre un car pour Hospet. Là, je devais prendre mon bus de nuit pour Bangalore. Dans le car entre Hampi et Hospet, on a assisté à un magnifique coucher de soleil rougeoyant au-dessus des bananeraies. Les lycéennes qui rentraient chez elles prenaient des photos avec leurs téléphones. En arrivant à Hospet, solidarité touristique oblige, je fais connaissance avec les quatre autres blancs qui étaient dans le car : on va tous à Bangalore, et on est tous autant paumés. Il nous faut d'abord trouver le lieu où prendre notre bus. Il s'avère qu'on ne prend pas tous le même, et que selon les compagnies, les bus ne partent pas du même endroit... Mes éphémères compagnons de voyage sont un couple américano-canadien et un israélien et sa mère qui font un tour de l'Inde. Ces derniers voyagent sur la même compagnie que moi, et à quelques minutes près sur le même bus... La mère, adorable mais de nature inquiète, voudrait qu'on change mon billet pour que je fasse le trajet avec eux. Ce n'est pas possible évidemment, toutes les places sont réservées, et je la rassure comme je peux en lui disant que j'ai déjà fait plusieurs trajets de nuit et que ça s'était toujours bien passé. 

Après quasiment deux mois passés en Inde, je m'aprêtais à annoncer fièrement un 1-0 pour moi, mais Hospet a bien failli m'avoir.

[Attention, ca va devenir trash]

Nous avions tous plusieurs heures devant nous avant de prendre nos bus de nuit, et il fallait qu'on mange. Nous sommes allés dans le premier restau qu'on a trouvé, proche de la gare routière, et qui semblait correct. C'était un endroit "vraiment" indien, et les seuls blancs qu'on pouvait y trouver étaient des touristes comme nous en transit entre Hampi et une autre destination du Lonely Planet. On nous a fait monter à l'étage, dans une salle presque vide, où nous avons pu déposer nos bagages (ça faisait pas mal de sacs à dos entassés). On ne connaissait que quelques plats qui étaient inscrits sur le menu, et avant de passer une nuit entière dans un bus on s'est dit qu'il valait mieux la jouer safe. On a commandé des masala dosa et des puri baji, des plats à base de galettes et de sauces qu'on trouve partout en Inde. C'était un peu gras (ils cuisinent beaucoup à l'huile en Inde, mieux vaut ne pas etre au régime) mais c'était bon. Sauf que. A la fin du repas, j'ai eu comme une envie pressante d'aller aux toilettes. Le genre d'envie pressante qui n'augure rien de bon, surtout quand on s'aprete à passer la nuit dans un bus - sans toilettes évidemment. Les toilettes du restau étaient comme pas mal de choses en Inde, plutot incongrues : le batiment dans lequel se trouvait le restau était à moitié construit, et les toilettes se trouvaient dans la partie pas vraiment finie. Il fallait traverser une salle en chantier pour y aller. Normal. C'étaient des toilettes à la turque, sans PQ - normal aussi. Mais surtout, c'étaient les toilettes les plus puantes dans lesquelles j'avais eu l'occasion d'aller depuis mon arrivée en Inde. Le type de puanteur à vous faire renoncer de vous soulager meme avant une nuit de bus. Une odeur si prégnante qu'on se demande si elle ne va pas nous coller à la peau pour les 15 prochains jours - encore pire que d'entrer dans un magasin Sephora. Bref, des chiottes où meme un bouc refuserait d'uriner. Mais ma copine Margot m'avait bien dit : "Surtout quand tu sens que ca vient, n'essaies pas de te retenir! Pas de médocs, il faut que ca sorte." J'ai donc fait un premier passage en apnée et suis resortie vivante de cette antichambre de l'enfer. Mais il a fallu que j'y retourne 15 minutes après. Et j'allais beaucoup moins bien. J'attendais mon bus avec les israéliens, en m'amusant de voir des vaches bloquer la circulation*, quand j'ai commencé à me sentir fiévreuse et que mon estomac a commencé à me signifier qu'il y avait un problème. J'avais beau lui dire "Non non et non, tu ne peux pas me faire ca maintenant, on s'est bien entendus jusque-là alors tu vas pas me lacher juste avant d'entrer dans un bus indien" il ne voulait rien entendre. Pas de toilettes dans le petit bureau de la compagnie de bus, of course. J'ai foncé vers le restaurant** où il y avait 3 femmes qui faisaient la queue pour les toilettes, of course. J'ai cru me faire dessus. Je respirais profondément en me concentrant sur les fils électriques à nu qui se baladaient au plafond, les barres de métal qui attendaient d'etre recouvertes de ciment, l'immense fenetre ouverte sur la rue et sans aucune protection - of course. Quand la dernière a eu fini, j'ai réussi à ne pas foncer dans le tas comme un rugbyman enragé ; je suis entrée très civilement dans cet antre du diable, plutot heureuse d'y revenir cette fois, meme si l'odeur n'avait pas changé entre-temps. Et là, je me suis crue dans Trainspotting. Vraiment.*** Les murs recouverts de merde, je ne pouvais m'appuyer nulle part, je devais tenir accroupie alors que j'étais chancelante, tout en faisant en sorte que mon salwar (non mais quelle plaie ce pantalon avec ses mètres de tissu!) ne tombe pas dans le trou - et accessoirement que je ne défèque pas dessus. La puanteur extreme n'arrangeait rien à ma fièvre subite, j'avais l'impression que mon état empirait à chaque respiration. Et là, je me suis dit que j'avais vraiment fait "l'expérience indienne". Je suis resortie de là pas forcément mieux qu'en y entrant mais un peu plus vide, j'ai acheté une bouteille d'eau histoire de ne pas me déshydrater pendant la nuit, et je suis retournée attendre mon bus. Et 15 minutes plus tard c'était passé. Ca a été la tourista la plus fulgurante que j'aie jamais eue. Inde = 1, Claire = 0.

 

[Je vous avais prévenus. C'est fini maintenant.]

 

Entre-temps deux allemandes étaient arrivées pour prendre un bus. Les vaches broutaient toujours leur bout de trottoir et s'amusaient toujours à emmerder les automobilistes - ou l'inverse. Une des allemandes qui comme nous tous portait des sandales a malencontreusement foutu le pied dans une bouse. Holy shit! Quelle bénédiction : elle venait de mettre le pied dans une merde sacrée!

 

[Ok maintenant c'est vraiment fini la scatologie]

 

Les israéliens ont pris leur bus, puis les allemandes, puis à peu près tout le monde, et puis finalement le mien est arrivé avec seulement une heure de retard. Le lendemain matin j'étais à Bangalore, où j'ai passé 24h avant de prendre un nouveau bus de nuit pour Pondichéry - dans lequel j'ai rencontré un indien qui parlait parfaitement français. J'étais tellement habituée depuis le début de mon voyage a entendre parler anglais avec un accent à couper au couteau que j'ai mis un moment à percuter. 

 

 

* * * ** ******* ** * * * 

 

 

Hem... j'avais commencé la rédaction de ce post il y a, disons, quelques jours... Jamais eu le temps de l'achever.

Et il faut que je fasse vite parce que je pars ce soir (!!!) de Pondichéry, après un mois passé ici, pour les plantations de thé de Munnar. L'idée est surtout d'aller me rafraîchir dans les montagnes au milieu de hordes de touristes indiens et blancs qui n'en peuvent plus eux non plus de la chaleur des plaines.

Alors, au sujet de ce mois et demi à Pondy, et en vrac : 

- à mon arrivée j'ai eu droit à un hachis parmentier. Ouais c'est super exotique, mais que voulez-vous, après deux mois à manger masala ça fait du bien. On se refait pas. Et ça m'a fait penser que Jean-Didier Urbain n'a rien écrit (il me semble) sur la nostalgie culinaire de l'idiot du voyage. Je vais lui proposer un chapitre pour la prochaine édition de son bouquin je crois. 

- deux jours après mon arrivée, j'ai tourné dans un film. Je me baladais le nez au vent, j'ai vu une équipe de tournage, je me suis approchée et ni une ni deux ils m'ont invité à faire une scène. Voilà comment je me suis retrouvée à faire des pas de danse avec un type en avançant devant la caméra, pendant que le couple-héros du film faisaient une chorégraphie derrière nous. Ils devaient me rappeler le lendemain pour continuer la scène, mais je pense que quelqu'un a vu les rushs et n'a pas jugé ça utile.

- j'ai loué un vélo et je l'ai conduit pendant tout mon temps à Pondy. Même pas peur, et je suis toujours en vie. En fait c'est moi le danger public.

- je me suis bien éclatée avec les enfants de l'école française, à leur apprendre l'aquarelle et à peindre avec eux. Ils ont fait de chouettes aquarelles qu'on a exposées avec les miennes au lycée, et ils étaient pas peu fiers.

- je suis allée à Auroville. Il faudra que je développe quand j'aurai le temps, mais grosso-modo : c'est une ville dont la construction a commencé dans les années 70. C'est La Mère, une française installée à Pondichéry, qui faisait partie de l'ashram de Sri Aurobindo, qui a initié ce projet. Auroville se veut une ville ouverte à tous sans distinction de culture, de nationalité, de couleur de peau ou de religion. Il y a un énorme bâtiment qui ressemble à un Ferrero Rocher où on peut méditer dans le silence le plus complet. Il faut être d'Auroville pour pouvoir y entrer, et j'ai eu l'opportunité d'y aller grâce à une amie d'amis. On en pense ce qu'on veut, mais 20 minutes de silence intense en Inde, c'est pas du luxe.

- je suis allée au cinéma! Enfin! Mais il ne passait pas de Bolywood... et, j'avoue j'étais un peu déçue, le film était bien! Beh oui on m'avait vendu les films indiens comme un enchaînement d'incohérences scénaristiques, de chorégraphies colorées et de scènes d'action aux effets spéciaux délirants! Il y avait bien des scènes d'action assez drôles, mais dans l'ensemble le film se tenait, et on n'a eu droit qu'à deux chorégraphies. Par contre j'ai failli resortir sourde et congelée, et ça il paraît que c'est partout pareil dans les cinémas indiens.

 

Voilà! J'ai presque oublié que j'étais en Inde à force d'être entourée de français et d'entendre parler la langue de Molière autour de moi, mais c'est fini tout ça! Ce soir, retour à la "réalité" de l'Inde (c'est quoi l'Inde réelle au fait? on n'arrête pas de me dire que Goa c'est pas l'Inde, qu'Hampi c'est pas l'Inde, que Pondichéry c'est pas l'Inde... Il faut aller à Gare du Nord pour voir l'Inde réelle?) Je prends le train pour Madurai, et de là le bus pour Munnar, où je devrais retrouver un ami indien rencontré sur le projet à Mumbai.

Des news bientôt!! (enfin c'est relatif...)

 

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*C'est un cliché bien vivant : il y a vraiment des vaches dans les rues, et elles ont une liberté totale. Et elles le savent.

**Enfin j'ai marché le plus vite possible en ayant l'impression de courir comme Hussein Bolt - je commencais à voir un peu trouble et il s'agissait pas de trébucher sur un morceau de trottoir défoncé.

***Quelque chose comme cette scène-là

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